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Investigations dans l'espace nomade

Notes sur l'art et la pensée nomades.
Paris, Éditions Isolato, 2014.

Présentation du livre

On connaît les deux concepts, nomadisme intellectuel et géopoétique, que Kenneth White a mis en avant pour ouvrir les voies menant à au monde qu’il a toujours eu en perspective. Toute son œuvre en présente la cartographie. Mais ces Investigations en offrent, fragment après fragment, un résumé saisissant. Un livre rapide comme l’éclair, qui traverse les steppes de l’esprit au rythme d’un cavalier nomade, avec une exaltation et une acuité rares.
« Disons, avec un rire cosmique, que le troisième millénaire sera nomade et géopoétique ou ne sera pas. »
Extraits
Préface

Cet ensemble de notes et de fragments a paru d’abord sous le titre Déambulations dans l’espace nomade. Je préfère maintenant le terme d’« investigations », plus chercheur et plus précis.
J’ai saisi l’occasion de cette réédition pour revoir sa texture et pour repenser sa place dans l’espace de mon travail. On peut le considérer, comme un archipel au large du continent de L’Esprit nomade.
En reprenant le livre, en lui donnant un autre contexte et un autre titre, je pensais aux Investigations philosophiques de Wittgenstein, un des plus isolés des philosophes, et surtout à cette phrase : « Considérez la géographie d’un pays pour lequel nous n’avons pas de carte ou sinon une carte en petits morceaux. La difficulté représentée par cette situation est la difficulté de la philosophie : il n’y a pas de vue synoptique. » À la place de toute visée totalisante, des aperçus et des esquisses. Nous avons là les prémisses de la géopoétique.
J’ai ajouté à la fin quelques éléments iconographiques. Moins comme illustrations que comme supports de méditation.
                                                                                                                                                KW Janvier 2013
 

Début du livre


Le mot « nomade » évoque, dans un premier temps, l’espace et le mouvement : espace, étendue, énergie en mouvement. Quand, à ce mot, on associe le mot « art », on pense, encore une fois dans un premier temps, aux objets faisant partie du mobilier des tentes dans le désert : livres, tapis théières… et puis, dans un contexte plus archaïque, aux tas de pierres élevés le long des pistes, entourés parfois d’os d’animaux, ou bien aux signes gravés sur des rochers. Tout ceci, à l’époque moderne, ne serait qu’exotisme, ethnographie, muséographie, si, aux approches de la fin de cette époque moderne, ne s’était pas manifestée, de manière diverse, une sorte de nostalgie du nomadisme : un désir d’espace et de mouvement, la recherche de nouveaux moyens pour déployer l’énergie de l’être, en dehors des dialectiques usées et des inscriptions codifiées. Les civilisations sont mortelles, dit-on, et qui pourrait le nier ? Leur fin est déjà inscrite dans leur commencement. Le nomadisme, lié à l’espace plutôt qu’au temps, échapperait-il à cette fatalité ? Bien sûr, l’histoire absorbe tout, et les civilisations ont absorbé leurs nomadismes voisins. Mais pourrait-il subsister quelque chose comme un nomadisme… intellectuel ?
Dans les pages qui suivent, je vais nomadiser autour de la question de l’art. Je vais parler de la nomadisation de l’art, de sa sortie des schèmes classiques, du cadre de la représentation, de l’humanisme. Je vais parler de l’art des civilisations nomades répertoriées : Scythes, Mélanésiens, Touaregs, Bochimans… Je vais essayer de parler d’un nouveau nomadisme et d’un art … géopoétique.

                                                                                   *

Parlons d’« instructions poétiques » comme on dit « instructions nautiques ». Il s’agira ici d’une navigation de l’esprit dans l’océan du monde, avec des repères, des balises (marques latérales et cardinales) – et beaucoup de blanc, pour les découvertes. On lira parfois sur la carte : « Ici on entre dans un champ poétique intense. » Ailleurs : « Ici se trouve un détroit de pensée difficile. » Ailleurs encore : « Ici se sont produits quantité de naufrages. » Nulle part on ne lira : « Ici vous pouvez vous reposer et relâcher l’attention. »