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L'Ermitage des brumes

Occident, Orient et au-delà
Entretiens avec Éric Sablé, suivis de « L’Anorak du goéland » (haïkus).
Paris, Éditions Dervy, 2005.

Présentation de l’éditeur

     Parmi les Occidentaux qui se sont plongés dans la pensée et la poétique orientales, Kenneth White occupe une place à part. Chez lui, à une compréhension profonde s’allie une liberté de pensée qui dépasse l’attitude figée dans le respect sans tomber dans les facilités de la désinvolture.
     Au cours de cinq entretiens : « Orient et Occident », « Hautes études », « Voyage », « La pratique étendue », «Poétique », Kenneth White s’explique, expose son itinéraire, pratique ce qu’il appelle culture comparée et culturanalyse, afin de dégager un espace situé au-delà de l’Occident et de l’Orient considérés comme blocs opposés.
     Ces cinq « conversations sur la côte » sont suivies d’un recueil de haïkus, « L’Anorak du goéland », qui présente, à travers divers lieux, des moments vécus intensément dans le monde ouvert.

Extraits
Préambule à « L’Anorak du goéland » (version légèrement remaniée de l'édition originale)

     Voulant trouver un titre pour cette série de haïkus, j’ai ouvert au hasard un livre de koan (« phrases à creuser ») zen.
     À la question du maître : « Quand il n’y a plus d’endroit où aller, que se passe-t-il ? » l’élève répond : « Quelques pierres sur un vieux chemin. » Cela m’a beaucoup tenté, car ces mots, quelques pierres sur un vieux chemin, expriment une idée qui me tient beaucoup à cœur : celle d’une continuité de travail à travers l’espace et le temps – un mouvement profond, derrière tout le brouhaha.
     Mais aujourd’hui, jour de pluie, alors que je me promenais sous les cris des goélands dans la grisaille marine, pensant au manteau de pluie que le vieux maître Bashô voulait offrir au petit singe trempé, un titre s’est enfin imposé : « L’Anorak du goéland »
     Je revois mentalement les lieux où ces haïkus ont été écrits : des rivages écossais, une île atlantique, une vallée pyrénéenne, un chemin de montagne à Taïwan, une rue de Kyoto, ici même, dans l’ermitage des brumes. Je pense à ces lieux et, à travers eux, à quelque chose qui porterait difficilement un nom, mais qui transparaît, peut-être, ici et là, dans cette poignée de « non-poèmes ».
     Écrits d’abord parfois en anglais, parfois en français, les haïkus sont présentés ici dans les deux langues. Pour le plaisir d’aller de l’une à l’autre. Pour montrer que l’essentiel passe à travers les langues et les cultures. Et aussi parce que, dans la tradition japonaise, un haïku est dit deux fois : une fois pour frapper l’esprit, la deuxième fois pour pénétrer dans l’esprit.
     En donnant des titres aux haïkus, je vais, j’en suis bien conscient, contre l’usage classique. Je donne des titres, non seulement pour la commodité de la référence, mais, dans le cas des noms de lieux, pour indiquer un itinéraire, et, dans le cas de titres plus abstraits, pour créer une dimension de plus, une « précipitation » (comme dans une solution chimique) supplémentaire.


Une poignée de haïkus

Transformations

Pensant à  ma vieille chambre :
la tasse à l’anse cassée
qui devint un bol

Transformations

Thinking of my old room :
the cup with the broken handle
that became a bowl



Automne au temple de Luk Wu

Vent dans les pins
le tintement de la cloche du toit
et à travers la moustiquaire : la lune

Autumn at Luk Wu temple

Wind in the pines
the roof bell tolling
and through the mosquito net : the moon



Méditation

Un temple dans la montagne :
le balai qui passe
le balai qui passe

Meditation

A temple in the mountains :
the sound of sweeping
the sound of sweeping



La route du Nord

Sur la rive nord
du grand Saint-Laurent
je mange des maquereaux en boîte

The Northern route

On the North bank
of the mighty St Lawrence
eating mackerel from a tin



Novembre

Sur le toit à présent
une pie solitaire
qui regarde la brume

November

On the roof now only
one lone magpie
gazing at the mist.