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L'Esprit nomade

Paris, Grasset, 1987.

Présentation de l’éditeur (fragment)

     Depuis quelques années, le nom de Kenneth White est lié non seulement à une œuvre considérable de poète et de prosateur, mais aussi à un projet culturel d’envergure qui tourne autour de la notion de «nomadisme intellectuel».
     On en voit les prémisses dans La Figure du dehors, qui fut pour beaucoup une révélation et une respiration. Le travail se précise dans Une apocaypse tranquille, livre de culturanalyse et de déblaiement du terrain. Dans le présent volume, White complète sa cartographie et éclaire sa démarche, tout en frayant de nouvelles pistes. […]
     Partie intégrante d’une œuvre qui est une des plus riches et des plus stimulantes en cours aujourd'hui, L’Esprit nomade apparaît un des livres clés de cette fin du XXe siècle.

Extraits
Préface (fragments)

     Notre temps manque singulièrement d’espace et de respiration.
     Les grands cheminements critiques d’hier ayant été réduits à des « discours de maître » ou à des pratiques réductrices, la nouveauté a consisté à les rejeter en bloc. Il en résulte une morosité massive (bon terrain pour des accès d’irrationalité), une régression idéologique, un cynisme ricanant (ou son contraire, une sentimentalité excessive), une infantilisation socio-culturelle, la ruée écervelée vers toutes sortes de mécanismes, des tactiques à court terme et une littérature sans ouverture.
     L’esprit étouffe.
     Le présent livre se propose non seulement de reprendre la grande ligne critique (et potentiellement créatrice) du XIXe siècle, mais d’agrandir le champ de l’exploration, d’ouvrir une aire culturelle où les énergies circuleraient plus librement.
     […]
     L’aspect « autobiographie intellectuelle » est, de toute évidence, comme dans mes autres essais, fort dans ces pages. J’y parle d’auteurs et de textes qui m’ont aidé moi-même à découvrir ce qui vraiment m’intéresse. C’est à la fois un gage d’authenticité et, me semble-t-il, le seul moyen de dire quelque chose qui puisse, éventuellement, intéresser (au sens fort du mot) d’autres esprits.
     […]
     Le nomade qui est en chacun de nous comme une nostalgie, comme une potentialité, n’a pas la notion d’identité personnelle, la « conscience de soi » lui est étrangère. Ne disant ni « je pense », ni « je suis », il se met en mouvement et, en chemin, il fait mieux que « penser », au sens pondéreux du mot, il énonce, il articule un espace-temps aux focalisations multiples qui est comme une ébauche de monde.

Presse
L’Esprit nomade constitue une vaste carte parsemée de repères questionnants qui renvoient aux cheminements les plus divers de la pensée active et principalement à ceux « qui ne mènent nulle part » selon la formule incontournable de  Heidegger. À cette différence près peut-être que le poète-penseur de Kenneth White se double toujours d’un homme d’action. Levant un coin du voile sur la vie de penseurs pas assez lus comme Élisée Reclus ou Kropotkine, ces pages nous rappellent que le trajet nomade ne date pas d’hier mais aussi qu’il y a de nouveau urgence à le pratiquer si nous ne voulons pas sombrer dans l’esthétisme stérile ou le réductionnisme philosophique. […] En bon historiographe de la pensée, Kenneth White remet les pendules à l’heure et nous indique à quelles sources oubliées puisent les livres, il pense comme un homme conscient du désastre vers lequel nous nous acheminons et tente de sauver ce qui peut encore l’être.
     Claude Margat, La Quinzaine littéraire

L’idée-pivot du travail de White est le « nomadisme intellectuel ». À travers lui, ce que vise White (son récent recueil d’entretiens, Le poète cosmographe, le prouve), c’est une mise en question géographique de l’espace intellectuel occidental, en un programme rigoureux d’espacement. Réinsuffler de l’espace dans la pensée, dynamiter l’unidimensionnel, c’est suivre des lignes « bourgeonnantes » autant que ces côtes de la Bretagne dont le mathématicien Mandelbrot a su donner un modèle « fractal ». De Cooper à Thoreau, de la citation au haïku, les « sauts » whitiens, ses dérives non-conformistes, l’ambiance sans religion ni mystique, et pourtant habitée, de ses textes, sont une pensée qui se fait espace.
     Arnaud Villani