accueil
portrait
portrait
portrait
portrait
portrait
portrait
portrait
© 2008 - Une réalisation Symbiose Informatique - Création graphique : Sucré Salé     fr    us

Terre de diamant

Nouvelle édition revue et augmentée de poèmes traduits par Marie-Claude White.
Paris, Grasset, 1983.

Présentation de l’éditeur pour la deuxième édition

     Dès le début de son activité poétique, Kenneth White s’est engagé dans la recherche d’une expérience dense et lumineuse du monde dont il trouve les antécédents chez une lignée de poètes-penseurs existentiels allant des présocratiques aux tao-bouddhistes de l’Orient […]
     Le livre suit un itinéraire qu va de l’Écosse en France, de là à d’autres pays européens, ensuite en Afrique du Nord, en Amérique, dans le grand Nord canadien, en Orient, pour terminer dans les Pyrénées. Tout le long de l’itinéraire s’égrènent des poèmes denses et limpides qui répondent au programme du poète américain William Carlos Williams : « Tel doit être l’avenir : pénétrant et simple. »

Extraits
(Nouveaux poèmes traduits par Marie-Claude White)

Le juif errant
(Miniature des Heures d’Anne de Bretagne)

Il sort des blanches solitudes
par un après-midi, quatre heures peut-être
au XVe siècle, ou dans l’éternité
drapé d’un sombre manteau de chagrin
un chien grognon sur ses talons gelés

cherche refuge dans cette maison de France
où l’on coupe le bois, où l’on cuit le repas
son pied est sur la marche – quelles sont ses chances ?

(peut-être ne le reconnaîtront-ils pas ? auront oublié ?
il y a si longtemps… qu’il serait bon de rester…
peut-être leur faut-il un secrétaire ?) il entre –

le jour suivant, le long des haies, sous la bise qui siffle.


Lettre à Érigène


« Effort » semble soudain le mot qu’il faut
dur labeur, travail sans trêve
comme acquérir les bases d’une grammaire
se frayer un chemin dans une logique inconnue

c’est la terre en travail qui produit le diamant

ici sur ce rivage anonyme, connaissant l’ouvrage
qui sont les ouvriers ? qui les découvreurs ?
la réalité opère – des prodiges ? ouvrer-ouvrir

les anciens signes montent du matin
le crâne s’emplit et se vide avec la marée
énergies ramassées, le premier acte

côte rocheuse, rocailleuse, vents rudes
le langage nous dénoue, nous dénude

province de roc, racines – et lumières.


Prose pour le col de Maire-Blanque

C’est l’hiver dans la montagne profonde. La neige tombe à gros flocons. Ici, au col de Marie-Blanque, on marche, lentement.

« Ce n’est ni une étude, ni un savoir livresque, cela filtre à travers l’esprit. »

Le col de Marie-Blanque n’a rien de grandiose. C’est un petit col de rien du tout. On n’y fait pas de prouesses. On y cherche autre chose.

« L’homme réel possède le diamant de la connaissance. »

Le sentier grimpe à travers bois : sapins, chênes, bouleaux. Il y a si peu à dire. Nous ne parlons pas. Nous mettons un pied devant l’autre et laissons faire la neige.

« Les loups seuls demeurent dans le bois obscur et silencieux. »

Nous sommes les loups blancs de ces espaces ultimes. Nous aimons cette distance, ce froid illuminé. Notre vie est secrète. Elle n’est plus à nous.

« Si le grand givre n’a pas mordu les branches, comment les fleurs du prunier peuvent-elles être odorantes ? »

Lorsqu’on me demandera à quelle religion j’appartiens, je dirai : à celle du col de Marie-Blanque.


Matin de neige à Montréal

Certains poèmes n’ont pas de titre
ce titre n’a pas de poème

tout est là dehors.

Presse
(Articles consacrés à la deuxième édition)

Kenneth White est devenu l’un des grands itinérants d’aujourd'hui. Le plus étonnant, à juger par les deux recueils de poèmes qu’il publie simultanément, en anglais et en traduction française, c’est qu’il se trouve partout chez lui, de sorte que, s’il écrit dans sa langue, il s’arrange pour ne jamais être intraduisible : une poésie des notions, des rapports et des étonnements perpétuels doit pouvoir se rendre dans tous les idiomes.
     Alain Bosquet, Le Monde

Il est vrai que la poésie contemporaine fait peur. On l’imagine abstraite, difficile, voire incompréhensible. En deux volumes, d’une beauté aussi évidente que limpide, Kenneth White rétablit la vérité. Qui aime la poésie, qui la croit vivante, indispensable, doit absolument lire Terre de diamant et Scènes d’un monde flottant.
White appartient à la famille des poètes vagabonds, comme Cendrars, Mac Orlan ou Whitman, auxquels il se réfère parfois. […] Mais les voyages physiques, matériels comptent moins que les voyages de la pensée et de la sensibilité. White est imprégné de la philosophie et de la littérature orientales. il n’a pas besoin d’aller à Katmandou pour y trouver les secrets de la méditation. Un châtaignier, dans l’Ardèche, ou un bistrot de l’île Saint-Louis lui suffisent tout aussi bien. […] La moindre chose capte son attention. Elle peut résumer l’univers à elle seule.
 D’où l’utilisation d’un langage très simple, très clair, quasi pictural. White brosse de petits tableaux dont l’apparente simplicité n’a pas fini de nous fasciner. Plus on les lit, plus on les médite, plus on y découvre des reflets inattendus, des trésors à peine saissables dans leur concision.
     Jean-Pierre Enard, V.S.D.

La première édition de Terre de diamant devint rapidement une manière de vade-mecum pour tous ceux qui, déçus par une certaine vacuité contemporaine, avaient résolu de pratiquer l’errance mentale et physique, à la recherche de territoires plus appropriés.
L’impossible itinéraire a été balisé par Kenneth White, engagé dans une recherche à la fois dense et lumineuse […]. Préoccupé de clarté, il a tendu un arc entre les philosophies occidentale et orientale, assimilant présocratiques et tao-bouddhises. […]
Parcours initiatique, l’œuvre de White ne néglige jamais le contact immédiat avec la réalité brute.
     Marc Baronheid, La Wallonie