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Les Cygnes sauvages

Traduit de l'anglais par Marie-Claude White.
Nouvelle édition revue et corrigée. Marseille, Le mot et le reste, 2013.

Préface à la nouvelle édition

La nouvelle édition d’un ouvrage n’est pas seulement une remise en disponibilité pour une nouvelle génération de lecteurs, c’est l’occasion d’une nouvelle lecture, y compris de la part de l’auteur, et d’un nouveau positionnement général.
Quelques mots donc, en préambule.
À divers moments, différents lieux de la terre m’ont attiré, disons, comme des champs magnétiques. Dans le  cas du présent livre, ce fut le Japon. « Loin au bout de l’extrême-Orient, avec ses archipels, le superbe Japon », écrit Élisée Reclus dans sa Géographie universelle, et il ajoute : « un monde à part ». « Monde à part », c’est le leitmotiv des écrits de ce géographe anarchiste qui avait en tête la conception d’un grand poème du monde. Je partage cette conception de Reclus, mais sans vouloir être aussi global que lui. En me concentrant seulement sur quelques lieux ici et là, et en approfondissant la notion même de « monde ».
Pour ce qui est du Japon, tout le nord-est du pays, la région de Tôhoku, fut pendant longtemps terra incognita, habitée par des « barbares », ancêtres des Aïnous. Sur les très anciennes cartes du pays on voit, vers le  nord, une contrée, une île, appelée Gandô ou Kari no Michi, termes qui évoquent un mouvement d’oiseaux migrateurs. C’était le pays que l’on voit tout au bord de cartes moins anciennes, marqué Ezo ou Yezo. Ce n’est que plus tard encore, après l’annexion de tout le territoire par l’État japonais, qu’on allait l’appeler Hokkaidô, « la route de la mer du Nord ».
Le Nord-Est et le grand Nord attiraient le poète Bashô qui, après un voyage dans ces parages (pas aussi loin qu’il aurait voulu), écrivit son plus beau livre Oku no hosomichi, diversement traduit comme, par exemple, La Sente étroite du Bout-du-Monde, Sur le chemin étroit du Nord profond ou encore Le Chemin étroit vers les contrées du Nord. Et il allait continuer à attirer des écrivains plus modernes, tel Yasunari Kawabata, dans son récit Yukiguni, « Pays de neige ».
Il s’agit, au fond, d’un espace de l’esprit.
La grande question pour un esprit de la modernité extrême a été : comment sortir d’un état de confusion grandissante et recommencer. Certains théoriciens en ont très bien parlé, sans pour autant réaliser ce recommencement (pour cela, au-delà de la théorie, il faut une puissance poétique). « Comment déconstruire nos systèmes de pensée et désenchevêtrer nos signaux », se demande Manuel de Diéguez dans Une histoire de l’intelligence. Et, évoquant « les seuls réellement commenceurs », il précise que leur but a été de « pénétrer jusqu’aux commencements dépourvus de tous présupposés et évidents par eux-mêmes. »
Étant donné ce que « la littérature » est devenue, s’engager dans une telle entreprise extrême, c’est, forcément, évoluer, pour ainsi dire, « hors littérature ».
Voulant sortir de la cage sociale (la plus grande partie de l’art ne fait qu’en décorer les barreaux), Rimbaud, on s’en souviendra, cherchait désespérément « le lieu et la formule ». Cela reste l’acte primordial.
Dans l’arène de ce que l’on appelle les « actualités », une catégorie partielle s’affronte à une autre, les opinions pullulent, le bavardage s’étale. Au nom de la communication, on parle de tout et de rien. C’est la ronde des modes, des modules et des modulations.
Au dehors, il y a, silencieux, le Monde.
Et malgré tout, discrètement, presque secrètement, en dehors de tous les enclos et de toutes les enceintes, suivant les voies et les lois d’une grande migration mentale, un autre espace de l’esprit commence, graduellement, à s’ouvrir et à se dessiner.
Voilà, en quelques mots, le message des Cygnes sauvages. Le reste se trouve sur les chemins du Nord-Est.

K. W.
Côte nord de la Bretagne
Printemps 2013
Extraits
Pour les extraits, voir à la première édition (1990).
Presse
Lire le compte rendu de Lionel Bedin sur le site de La Cause littéraire.

Lire également un long compte rendu de Lionel Bedin sur la première édition de ce livre dans son site Écrivains-voyageurs :

« Je flânais en ce dimanche matin à M. une petite ville au bord du lac d’Annecy. […]Les chiens de garde aboyaient. Et je pensais aux phrases que je venais de lire : «Mais où est l’humanité? Mais où sont les êtres humains? Il y a cette nation-ci et cette nation-là, et dans chaque nation il y a ce clan-ci et ce clan-là, ce parti-ci et ce parti-là, cette secte-ci et cette secte-là, cette personne-ci et cette personne-là. Tous avec des identité différentes auxquelles ils veulent s’accrocher, et prêts à se battre pour elle sans la moindre hésitation.» Et ces chiens qui aboyaient… «Quelle chance le monde a-t-il dans toute cette folie furieuse? On brûle les arbres et les herbes. On bétonne la terre. Tout ça au nom d’Une chose ou d’une Autre.» Et ces chiens qui aboyaient, au bord de ce lac si tranquille… Je lisais un récit de Kenneth White: Les Cygnes sauvages. Un récit de voyage. Et pour la première fois je lisais, je voyais, j’entendais, je comprenais, au travers ce récit de White, les dimensions multiples que peut avoir un récit de voyage. »