Lettres de Gourgounel
Traduit de l'anglais par Gil et Marie Jouanard.
Paris, Presses d’aujourd’hui 1979.
Préface de l'auteur
Me sentant, à une certaine époque, « exilé » comme le vieux Lieu Tsong-yuan, et seul comme un rhinocéros, j’avais cherché un lieu désert où concentrer, du moins pour un temps, ma vie et ma pensée. Je l’ai trouvé là en Ardèche, plus précisément au hameau des Praduches, au lieu-dit Gourgounel (ça gargouillait, ça parlait le langage des sources).
En ce temps-là, l’Ardèche faisait encore partie du « désert français », et je connaissais à peine son existence. J’avais tout au plus quelques vagues souvenirs du voyage dans les Cévennes de mon compatriote Stevenson et j’avais lu dans une biographie de Mallarmé qu’il y avait enseigné un temps l’anglais. Selon Mallarmé, le nom du pays résumait sa vie : l’art et la dèche.
Non pas que ce livre soit en quoi que ce soit mallarméen. Il constitue même un effort pour présenter un espace et une manière d’être au monde complètement différents de « l’espace littéraire » qui est, en France, le legs de Mallarmé. Il n’est pas « stevensonien » non plus. Il se veut moins gentil et esthétique que Stevenson, plus ouvert à des vents fous, avec de l’orage dans l’air et des lumières inédites. Comment qualifier l’espace de ce livre ? Je n’en sais trop rien. J’aimerais seulement qu’on y trouve la saveur du réel, et une poésie rude, sans affectation, sans complication inutile. « Nous voulons être les poètes de notre vie », disait Nietzsche, qui constitue la porte occidentale de ce livre, comme Tchouang-tseu en est la porte orientale.
Extraits
Presse